Stade en tuf situé à Aïn Benian près du cimetière chrétien. Son nom est le stade Blanc et il existerait depuis 1953.
Foot culture

Tuf et football algérien : Une longue histoire d’amour

Lorsque les Français introduisent le football en Algérie au début du 20e siècle, il n’y a pas encore lieu de parler de “rectangle vert”. En effet, à cette époque, dans les départements d’Alger, de Constantine et d’Oran, ce sport se pratique sur du tuf. Une surface de jeu jaunâtre, peu coûteuse et ne nécessitant pas beaucoup d’entretien. Elle est alors répandue sur tous les terrains de football du pays (sauf peut-être le stade Géo-André, disparu depuis pour laisser place à l’hôtel El Aurassi). Et ce, quel que soit le statut des 22 acteurs ou la division dans laquelle évoluent les deux équipes. Cette situation perdure bien après l’indépendance de l’Algérie jusqu’aux années 1970, qui voient l’achèvement de nombreuses nouvelles infrastructures sportives.

Le stade de Bologhine en tuf dans les années 1950 probablement.
Le stade de Bologhine en tuf dans les années 1950 probablement.

Le tuf, une surface obsolète

En 1975, les autorités algériennes entreprennent de doter plusieurs stades de clubs de l’élite de pelouses artificielles. Et pour cause, le tuf, malgré ses avantages et son charme nostalgique certain, présente quelques sérieux inconvénients. Tout d’abord, la rigidité de la surface, qui constitue un réel danger pour l’intégrité physique des joueurs. Propice aux blessures graves, le tuf abîme notamment les articulations et n’amortit pas convenablement les chutes brutales. Ensuite et surtout, l’imperméabilité à l’eau, qui rend très vite le terrain impraticable en cas de forte pluie. Cela oblige l’arbitre à reporter le match et chamboule, par conséquent, la programmation déjà difficile à maintenir à jour.

Le stade du 20-Août-1955 en tuf dans les années 1960.
Le stade du 20-Août-1955 en tuf dans les années 1960.

L’ère du tartan peut commencer

Plus proches d’un tatamis que d’un terrain gazonné, les premières pelouses synthétiques des stades algériens ressemblent à des tapis. Communément appelés tartan, comme pour les pistes d’athlétisme, ces tapis que l’on déroule en largeur sont vantés pour leur souplesse. Leur installation en 1975 concerne différentes enceintes datant de l’époque coloniale tandis que le stade du 5-Juillet-1962, alors nouvellement construit, dispose d’une surface de jeu en tartan dès son inauguration trois ans plus tôt. Petit bémol, ces pelouses se dégradent vite lorsqu’elles sont mal entretenues et surexploitées, ce qui est le cas en Algérie. Elles s’avèrent donc, avec l’usure du temps, aussi dures et dangereuses que le tuf et doivent être régulièrement remplacées.

Le RCK saison 1987-1988 sur le tartan endommagé du stade du 20-Août.
Le RCK saison 1987-1988 sur le tartan endommagé du stade du 20-Août.

Le tuf rétrogradé mais pas éradiqué

À partir des années 1980, le tuf est la surface attitrée des échelons inférieurs de la pyramide footballistique. Cette roche calcaire, abondamment présente en Algérie, devient en quelque sorte synonyme de relégation pour les clubs de l’élite. Aujourd’hui cantonné aux petits stades de proximité, le tuf demeure toutefois une surface importante pour la pratique du sport roi. En 2004, il recouvre plus de 91% des terrains de football recensés par la FAF à travers le territoire national. Ce chiffre descend à 70% en 2017, avec une nette percée du synthétique et une diminution non-négligeable des pelouses naturelles. Notons enfin que l’une des dernières équipes de D1 à recevoir ses adversaires sur du tuf est l’AS Aïn M’lila. C’était le cas au moins jusqu’en 1995, avant que l’exigu stade Demane-Debbih ne revête finalement un synthétique pour l’exercice 1997-1998.

Le président et les supporters de l’ASAM se plaignent du tuf et réclament une pelouse synthétique en 1990.

Le passage du tuf au synthétique

Petit bonus pour finir, le texte retranscrit ci-dessous nous apporte quelques détails sur le fameux passage du tuf au synthétique. Nous ne connaissons malheureusement pas l’auteur de cette brève ni le périodique sur lequel elle paraît en 1975. Néanmoins, bien que centrée sur Bologhine, elle nous renseigne sur l’ensemble des stades algérois sélectionnés pour cette transformation. À savoir : le 20-Août-1955, le 1er-Novembre-1954, Mohamed-Benhaddad et donc Omar-Hamadi. Nous pouvons déduire que l’absence du stade Zioui de cette liste est due à son étroitesse. Le terrain de l’enceinte hussein-déénne restera d’ailleurs en tuf jusqu’au milieu des années 1990. Signalons, pour conclure, que la pose du tartan ne concerne pas seulement la capitale. Le stade Ahmed-Zabana d’Oran fait également peau neuve en 1975, de même que celui de Tizi-Ouzou l’année suivante.

Le stade Marcel-Cerdan (aujourd'hui Mohamed-Ferhani) en tuf dans les années 1950.
Le stade Marcel-Cerdan (aujourd’hui Mohamed-Ferhani) en tuf dans les années 1950.

Bologhine : Le gazon artificiel est là

Fermées depuis assez longtemps, les portes du stade de Bologhine seront bientôt rouvertes au public. C’est en raison de la pose du gazon artificiel que cette fermeture prolongée a été décidée.
Il est utile de préciser qu’à l’image des terrains d’El Harrach, de Kouba et des Anassers, la pelouse synthétique retenue pour celui de Bologhine relève de l’astro-turf, une matière très souple et très pratique pour le football.
Une visite à ce stade nous a permis de constater que les travaux d’aménagement sont déjà aussi avancés et touchent à leur fin. Aussi, il serait fort probable que Bologhine “flambant neuf” sera livré au public au début de l’année prochaine.

Pose des tapis de tartan au stade de Bologhine en 1975.
Pose des tapis de tartan au stade de Bologhine en 1975.